La visite dansée de l’exposition Conditions d’utilisation débute avec l’exploration de l'installation [Dé]faroucher (2019-2023) de l’artiste VahMirè (Ludmila Steckelberg) avec Cara. Le groupe est d’abord invité à traverser la salle librement afin de s’imprégner du lieu. L’œuvre—composée de vidéos, sculptures, œuvres en réalité virtuelle, installation de rubans—représente ses lieux préférés de Montréal. Pour cette première interprétation, nous évoquons le parcours de vie de l’artiste montréalaise d’origine brésilienne. Au sein de son installation, l’artiste cerne ses état-d’âmes ambivalents face à différents espaces de la ville de Montréal: elle s’y sent chez-elle, accueillie, mais simultanément, exclue et isolée, à la fois confortable et inconfortable. Une discussion est entamée autour de sujets chargés tels que le sentiment d’appartenance en terre d’accueil et les lieux que nous occupons dans différentes sphères de nos vies. Une portion de l’œuvre de Steckelberg nous permet d’explorer des lieux symboliques pour celle-ci grâce à la photogrammétrie. Installé·e·s au sol devant une projection présentant l’artiste sous différentes facettes, nous prenons un moment pour revenir à notre corps, lorsque Cara nous propose un exercice de visualisation. Les yeux fermés, nous sommes transporté·e·s vers un lieu préféré, un espace où l’on se sent bien, apaisé·e·s et serein·e·s. Nous nous faisons guider par notre artiste de la danse, les mouvements corporels suggérés pour explorer nos imaginaires sont d’abord faits de façon timide, mais tranquillement le corps devient une matière malléable qui se façonne au même titre que l’œuvre.
Plusieurs participant·e·s témoignent être touché·e·s par le parcours migratoire de Steckelberg et manifestent avoir déjà éprouvé ce sentiment de défarouchement, cette émotion d’incomplétude et d’ambivalence face à un nouveau territoire. L’œuvre de Steckelberg résonne avec plusieurs réalités des groupes communautaires qui ont participé à nos visites dansées. Grâce à l’exploration des gestes intuitifs, la réticence laisse graduellement place au partage et aux confidences. Une personne nous fait part d’un rêve, celui de visiter la Mecque. À travers cette introspection guidée, elle réalise qu’elle peut voyager à travers ses pensées et prendre une certaine agentivité sur ses objectifs; cela lui fait un grand bien. Nous terminons cette portion de la visite en traversant une installation de rubans, une invitation au toucher met les participant·e·s en confiance. La possibilité de pouvoir toucher, bouger, occuper l’espace de manière vaste et amplifiée dans la salle du musée instaure chez les visiteur·euse·s un droit d’agir, de compréhension et de légitimité dans leur connaissance des œuvres et du parcours.