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PHI Artists Collectionpermanente Kara Walker Booty Walker credit Vivien Gaumand

Kara Walker

Sampler /Booty Call - 2013

Papier coupé sur papier
165.1×106.7 cm
Collection de Phoebe Greenberg

Photo: Vivien Gaumand

James Oscar sur Kara Walker

Une illustration à la fois viscérale, oraculaire, liminale et pornographique par la bande, Sampler/Booty Call de Kara Walker recourt à un format idéogrammatique et souligne ainsi la symbolisation d’une idée donnée, sans toutefois désigner les sons qui l’exprime. En tant que manuscrit « secret » et que révélation historique difficile à avaler, Walker exploite le rendu de ses personnages anthropomorphiques affreusement réels, issus de son répertoire usuel, et de quelques nouvelles figures : une tête anonyme, flottante, solitaire ; un phallus ; un ménage à trois, le désir de ses participants assouvi ; une tête sur le sol, fruit d’un possible lynchage ; un garçon noir qui rumine ; une négresse, élégamment vêtue, en plein sévice ; une figure non humaine qui en agresse violemment une autre ; une figure masculine, baïonnette à la main, vociférant contre son esclave et maîtresse ; une figure munie d’un outil, agenouillée devant une autre, et s’il reçoit une leçon ou craint un châtiment, il est incertain ; un personnage mythique et intrépide qui marche, voûté, à l’aide d’une canne ; un homme à la main levée qui s’apprête à rosser une femme penchée (avec consenstement ou de force) ; un despote et sa maîtresse qui fouettent leur esclave ; un agent des forces de l’ordre qui assaillit une victime retenue par une troisième figure, longiligne et anonyme, tel un bourreau ; une tête d’homme blanc, omnisciente et autoritaire ; une représentation pornographique d’une femme qui, consensuellement ou de force, donne du plaisir à un être monstrueux et géant ; une tête flottante de sambo stéréotypique, le visage noir représenté avec des traits de singe, qui évite la scène du regard. Un espace vertical, de haut en bas, oriente les icônes telle une grille qui profile ces obséquieuses histoires recelées — des plus phallocentriques à celles d’une tendresse subtile — étendues sur ce même champ. Ce champ ne raccorde pas forcément chaque figure pour en créer des « scènes » ; il propose plutôt que chaque protagoniste est un récit en soi, narré de manière implicite, ou encore directement, conté à la manière d’un griot. La mort sociale, le commerce des esclaves et leurs legs tordus sont autant de thèmes illustrés, à la fois d’un ton badin et d’une violence sanglante [1], et révélés de manière non hiérarchique sur ce manuscrit contemporain.

À propos de l'artiste

L’artiste new-yorkaise Kara Walker est surtout connue pour son regard franc sur les notions de race, de genre, de sexualité et de violence au moyen de silhouettes découpées qui ont fait l’objet de nombreuses expositions dans le monde entier. Née en 1969 à Stockton, en Californie, Kara Walker a grandi à Atlanta, en Géorgie, à partir de l’âge de 13 ans. Elle détient un baccalauréat en arts visuels de l’Atlanta College of Art (1991) et une maîtrise en arts visuels de Rhode Island School of Design (1994).

Figure-Fond

Sampler /Booty Call de Kara Walker est présentée dans le cadre de Figure-Fond, une sélection d'œuvres de la collection de PHI qui explorent la figure et la corrélation complexe et intime qu'elle établit avec son fond.

Note de bas de page

[1] Ou est-elle forcenée ? Voici d’autres termes qui peuvent décrire cette violence : assujettissante ; homicidaire ; frénétique ; brûlante ; véhémente ; exacerbée ; ingouvernable ; incontrôlée ; ardente ; cruelle ; sadique ; perverse.